Dans ce nouvel ouvrage, André ANTIBI nous fait part de l’optimisme que lui inspire la suite de son méritoire combat contre « la constante macabre ». Il rapporte ici les témoignages de ceux qui se sont engagés dans la voie qu’il a préconisée, et les réactions d’enseignants, d’élèves et de parents.

 Le contrat de confiance soulève de grands espoirs justifiés par de bons résultats.

 L’étude de ces témoignages fait bien ressortir l’importance de l’angoisse qu’il n’a cessé de dénoncer comme un véritable facteur d’échecs scolaires et aussi combien les experts, comme le public, peuvent se tromper dans leur interprétation négative des motivations des élèves.

Il faut lire ce livre et remercier ANTIBI pour sa ténacité et pour la noblesse de son combat.

 Toute activité n’existe que dans la mesure où elle est soumise à une évaluation. Les évaluations réciproques sont le fondement même de l’apprentissage et de l’enseignement. L’enfant lit la valeur de ce qu’il fait dans ce qu’il en retire mais surtout dans le regard de ceux qui l’entourent ; le professeur doit donc porter ce regard sur son travail et se soumettre lui-même au regard de la société qui doit à son tour savoir apprécier l’action de ses enseignants.

 Encore faut-il que toutes ces évaluations soient utilisables par les partenaires et adéquates à leur objet. Si les désirs ou les intérêts des protagonistes doivent se traduire par des exigences irréalisables ou par des concessions dommageables, les évaluations deviennent l’instrument d’un jeu pervers, source de tous les dérèglements et de tous les échecs.

 « Ici, Monsieur FERNANDEL fera rire » ordonnait à l’acteur éberlué un scénariste à court d’invention. C’est le genre d’injonctions que permettent toutes les évaluations scolaires qui ne sont pas assorties de décisions et de techniques appropriées.

 Tant que le public, les professeurs et les élèves n’auront pas le minimum de connaissances indispensables pour tenir leur rôle vis-à-vis les uns des autres, l’enseignement sera soumis à des dérèglements incoercibles.

 Le contrat de confiance proposé par André ANTIBI est essentiel. Il nous rapproche d’une époque où la sévérité était suffisamment assortie de confiance pour être acceptée par la majorité des protagonistes de l’école. Il ne sera pas suffisant si la chance qu’il offre n’est pas saisie. Nous devons assujettir nos évaluations à notre connaissance des moyens effectifs de les améliorer.

 Or, le tracassin des réformes récurrentes qui corrigent puis déstabilisent sans cesse l’enseignement, résulte de l’usage, de plus en plus barbare et répandu de ces évaluations formelles, et de l’ignorance des lois de ce qu’elles prétendent réguler. L’enjeu est ce que les citoyens tiennent pour le plus cher, l’avenir de leurs enfants, et leur insertion dans une société et une culture.

 Mais je perçois dans ces mouvements de bascule les efforts de certains de faire de l’enseignement un instrument au service d’autres intérêts. Avec une culture didactique insuffisante, cette évolution serait très dommageable. Car ces intérêts sont souvent contraires aux buts de l’éducation.  L’éducation doit servir d’abord à doter une population d’une culture commune partagée qui lui permette de prendre et de comprendre, ensemble, les choix dont son avenir dépend. 

Guy BROUSSEAU,

Didacticien, Médaille Felix Klein de l’ICMI*

* La médaille Félix Klein de l’ ICMI ( International Commission on Mathematical Instructions ) est la  plus haute récompense mondiale dans le domaine de l’Education Mathématique.